- ROUTES DE LA SOIE
- ROUTES DE LA SOIEROUTES DE LA SOIELes tribus de l’Asie centrale ont de tout temps été une menace pour la Chine. Vers les années \ROUTES DE LA SOIE 140-\ROUTES DE LA SOIE 134, lorsque les Xiongnu donnèrent à nouveau des craintes à l’empereur de Chine, celui-ci envoya son ambassadeur Zhang Qian auprès du peuple yuezhi, afin d’obtenir son alliance contre les Barbares. Zhang Qian découvrit à cette occasion un itinéraire qui allait de la Chine aux portes du monde occidental. En partant du Lobnor, dans la Chine du Nord-Est, deux passages étaient possibles à travers le bassin du Tarim pour parvenir à l’empire kush na (indo-scythe) situé entre le Syr Dary et l’ m Dary : l’un, au nord, par les oasis de Qarachahr, de Koutcha et de Kachgar; l’autre, au sud, par celles de Miran, de Niya, de Khotan et de Yarkand. Sous le règne de Wudi (\ROUTES DE LA SOIE 140-\ROUTES DE LA SOIE 87), des expéditions militaires menées par le général Ban Chao permirent à la Chine d’établir sa suzeraineté sur cette région. La traversée du Pamir rendue possible, une voie commerciale de première importance était ouverte entre les Chinois et les Parthes, voisins de l’Empire romain, qui lui-même possédait un réseau routier important jusqu’à la Méditerranée. C’est ainsi que la soie — que des textes datant du \ROUTES DE LA SOIE IIe siècle mentionnent déjà comme une des principales richesses de la Chine et qui jouait même le rôle de monnaie dans les échanges des Chinois avec l’étranger — pénétra en Occident. Dès la fin du Ier siècle, les auteurs latins tels que Pline ou Martial parlent du commerce de la soie, marchandise très prisée, et désignent les Chinois du nom de Seres (Serica étant le pays de la soie, de si qui signifie soie en chinois). Un commerçant gréco-romain, Maès Titianos, a l’idée hardie de faire reconnaître par ses agents la route de la soie, en vue d’éviter l’intermédiaire des Parthes qui monopolisent ce commerce. Son itinéraire jusqu’à Sera metropolis (Chang’an) nous a été transmis par Marin de Tyr (110) et Ptolémée (170).À la même époque, une route maritime est ouverte grâce à l’utilisation de la mousson pour faire voile vers l’Inde et au-delà: le Périple de la mer Érythrée , texte anonyme de 90, explique qu’en naviguant au-delà de la Chersonèse d’or (presqu’île de Malacca), on parvient à la ville de Thina, à l’intérieur des terres, d’où proviennent les soies. Deux routes de la soie sont donc ouvertes: celle de l’Asie centrale et celle de la mer, qui contourne l’Inde. L’importance de ces routes n’est pas seulement d’ordre commercial, mais également d’ordre idéologique: comme l’attestent nombre de vestiges archéologiques, elles permirent la pénétration en Chine du bouddhisme, quatre siècles après la naissance de cette religion en Inde gangétique.À la fin du IIe siècle, après la chute des Han et la division de l’Empire chinois en trois royaumes, la route terrestre de la soie est abandonnée pendant près de trois cents ans. Si l’Occident romain reçoit encore de la soie, c’est grâce à la route maritime empruntée, jusqu’au nord de l’Inde, par les Syriens, les Grecs et les Éthiopiens. Vers 300, la Perse sassanide, englobant l’ancien Empire parthe et principale concurrente de Byzance, tente de monopoliser le commerce de la soie. Mais un accord intervient finalement entre les deux puissances, aux termes duquel les échanges de cette marchandise ne peuvent se faire en Occident que dans la ville frontière de Nisibis.Vers 440, la Chine ayant rétabli provisoirement son unité, la route de l’Asie centrale est de nouveau ouverte. Byzance peut alors éviter le transit onéreux par l’Empire sassanide que rendait inévitable la seule route maritime et, à la faveur de la christianisation des tribus hunniques, emprunte un nouvel itinéraire qui, passant au nord du Caucase et de la mer Caspienne, contournant la mer d’Aral, arrive en Sogdiane pour rejoindre la route de l’Asie centrale. (Cette nouvelle route byzantine permet aussi la diffusion des idées philosophiques et religieuses: le nestorianisme atteint la Chine et son empereur en 845.)Aux VIIe et VIIIe siècles, le sud du bassin méditerranéen passe à l’Islam. La Perse, qui, grâce à sa situation privilégiée de plaque tournante des échanges, possède vraisemblablement depuis peu le secret du ver à soie, tombe aux mains des califes abbasides. À partir de ce moment, la Perse produit, tisse et vend à tout l’Occident. Cependant, Byzance continue à employer la route du Caucase, en passant par le nouvel État khazar, et la Chine écoule toujours de la soie grège par terre et par mer: la production perse est insuffisante.À la fin du IXe siècle, la Chine est à nouveau le siège de perturbations politiques. La Khazarie, de son côté, subit en 968 une grande défaite infligée par le prince de Kiev et disparaît de l’histoire un demi-siècle plus tard: les routes terrestres sont coupées et la soie ne voyage plus que par mer grâce aux musulmans. Cette situation se perpétue jusqu’au XIe siècle, lorsque les royaumes francs chrétiens du Levant s’affrontent à l’islam et cherchent à conquérir les Lieux saints. Les croisades sont alors l’occasion de contacts avec l’Orient: les Vénitiens se mettent à pratiquer le négoce de la soie et le commerce des épices. La sériciculture pénètre jusqu’en Sicile et plus tard jusqu’à Lyon. À cette époque, où les chrétiens veulent pouvoir se procurer la précieuse marchandise en évitant les musulmans, se répète le même processus qui avait fait s’ouvrir la route du Caucase. Les chrétiens pénètrent ainsi au pays de Cathay (Kitan) et le pape y envoie des missions; c’est par la route traditionnelle de l’Asie centrale que les frères Polo vont voyager au XIIIe siècle.
Encyclopédie Universelle. 2012.